Une hormone, c’est un peu comme un pigeon voyageur. Elle apporte à distance une information cruciale, et elle l’amène juste là où on en a besoin. C’est du moins la théorie, c’est-à-dire quand tout fonctionne bien. Mais lorsque des « perturbateurs endocriniens » (PE) entrent dans la danse, les choses deviennent plus compliquées. Que sont les PE ? « Ce sont des substances capables de mimer l’effet de certaines hormones ou d’utiliser des voies de signalisation spécifiques aux hormones » explique le Pr Bouchard. Résultat, le message hormonal est altéré, amplifié ou modifié, et l’organisme se dérègle. C’est dans les années 50, qu’aux Etats-Unis, on à commencé à s’intéresser à ce phénomène en observant un flambée de cancers chez des travailleurs immigrés mexicains, exposés au DDT. En 1962 paraît « le printemps silencieux » (Rachel Carlson) qui décrit un monde où les oiseaux ne chantent plus… car ils ont tous été intoxiqués ! Le livre connaît un retentissement mondial. Pour l’heure les oiseaux chantent toujours mais les alligators de Floride sont pourvus de micropénis et deviennent infertiles…
Les PE font souvent la Une des journaux et l’on trouve le meilleur comme le pire parmi les articles publiés sur ce thème. Car le sujet est complexe ! « Il y a plein d’hormones différentes, les mécanismes ne sont pas univoques, les voies de signalisations ne sont pas toujours classiques »… Quant aux perturbateurs endocriniens supposés ou réels, ils sont pléthore : dioxines, plastiques, BPA, phtalates… En faible quantité, mais présents partout. Sans oublier les médicaments. On connaît bien le fameux « distilbène », prescrit larga manu dans les années 60-70, on connaît moins l’impact de la pilule, qui, par le biais des urines des femmes, vient disséminer dans l’environnement quantité d’hormones. D’où la difficulté à calculer notre « exposome », c’est-à-dire la quantité de PE auxquels nous avons été exposés durant toute notre vie.
Les conséquences supposées de ces PE sont également nombreuses : cancers, troubles de la fertilité, anomalies des organes sexuels, diabète non insulinodépendant, obésité, et même… baisse du QI !
« Il faut établir un mécanisme de recherche efficace plaide l’endocrinologue. Comme ces PE agissent tous de manière différente il faut développer plusieurs modèles en même temps ». Et en parallèle, exploiter les informations du Big data, seul en mesure, de répondre à nos questions.
En attendant, et faute de certitudes, il est urgent de protéger les plus fragiles, enfants et femmes enceintes…
Perturbateurs endocriniens perturbateurs environnementaux
Catégorie
Société
INTERVENANTS
Philippe BOUCHARD
THÉMES
Hormonologie
ANNÉE
2018