Après cette échappée dans nos rêves, revenons à la place de la médecine dans la société. Comme Yves Agid, qui nous a fait découvrir une moitié de cerveau oubliée ou comme Isabelle Arnulf qui nous a dévoilé le pouvoir thérapeutique inattendu de nos rêves, Frédéric Worms professeur de philosophie à l’Ecole normale supérieure vient nous étonner. « Le rapport de la médecine à la vie n’est pas celui qu’on croit…. et cela change tout. »
Le postulat du philosophe : on pense que la médecine repose sur la connaissance scientifique de la vie ainsi que sur une philosophe éthique de la vie, qui serait un préalable. Or c’est le contraire qui est vrai : la médecine nous apprend ce qu’est la vie tant sur le plan scientifique que pour la conduite de notre existence. Autrement dit, il est possible de tirer de la médecine une philosophie générale de la vie.
« La médecine nous apprend que chez tout être vivant depuis le microbe jusqu’à l’homme, la vie est une lutte contre tout ce qui la menace.  » A partir de ce postulat se construit un savoir objectif.
Dans la dualité entre le docteur et le médecin, le docteur (le savant) doit s’effacer pour être au service du médecin. « Si on renverse les choses, on voit une blouse blanche, un technicien, un mécanicien du corps humain. »
De la même manière, on croit que la médecine doit s’appuyer sur une philosophie de la vie. Or les philosophies morales sont diverses, entre celles qui font de la vie une valeur absolue et d’autres qui ont une approche plus pragmatique et matérialiste.
Le médecin n’a pas à s’appuyer sur une morale extérieure. L’éthique médicale lutte par nature contre tout ce qui fragilise la vie humaine, contre tout ce qui peut conduire à la mort et accompagne la vie jusque dans ses derniers instants. La philosophie de la vie qui découle de la médecine est aussi une éthique du mourir.
« Non seulement il nous faut une éthique médicale mais en un sens très large, toute éthique a quelque chose de médical. «