Éclairer nos dépendances à l’autre

Celle qui nous rejoint maintenant sur scène ne vient pas seule. Elle est accompagnée de son auxiliaire de vie. Philosophe et chercheur, Anne-Lyse Chabert souffre d’une maladie neurologique rare qui lui fait perdre peu à peu son autonomie. « J’ai marché, j’ai fait du vélo, j’ai joué du piano comme tous les enfants. Et peu à peu, mon corps à commencé à oublier… » Tout cela à cause d’une seule lettre. Une seule lettre dans l’alphabet de l’ADN, une lettre fautive, une lettre maudite, qui suffit à infléchir le cours d’une existence.
La parole d’Anne-Lyse s’arrête. Ses difficultés d’élocution l’empêchent de poursuivre. Elle passe le relai à Swati, son auxiliaire de vie pour transmettre son message d’optimisme.
« Au fil du temps mes dépendances n’ont cessé de s’accroître. J’ai d’abord dû demander de l’aide à ma famille, puis à mes camarades de classe. Plus récemment il a fallu passer à l’aide médicale professionnelle. Quand on dépend à ce point des gestes de bienveillance et de la compétence de l’autre, on ne peut pas s’endormir dans l’insouciance. »
Au fil du temps, Anne-Lyse a compris que la relation avec l’aidant est faite de réciprocité :  » Cette rencontre avec l’autre qui m’aide est comme une fête toujours renouvelée. Certes nous sommes différents mais c’est cet écart qui nous réunit, j’ai besoin de l’aidant. Mais si tu regardes bien tu remarqueras ce que je peux t’apporter. »
« Il y a un art de donner comme il y a un art de recevoir. » Lorsque Anne-Lyse dit merci, ce n’est pas un aveu de faiblesse, l’aveu de celui qui est « redevable » d’un service. C’est un merci qui signifie la joie de la rencontre.
« Alors merci, vraiment merci de m’avoir écoutée ».

L’assistance n’a pas seulement écouté, elle a vibré aux propos d’Anne-Lyse. Comme en écho à l’émotion qu’elle nous a transmise, comme pour la remercier de cet échange, le public applaudit longuement, de toutes ses forces. Jusqu’à ce que le jingle retentisse. C’est le temps du partage. Partage d’un déjeuner, partage intellectuel. Chacun des orateurs se tient à la disposition des participants pour discuter, répondre à leurs questions. Ou même envisager des partenariats, des recherches communes. A la pause, les équipes de l’ICM, qui étudient le sommeil interrogent Philippe Peyrard sur ses lunettes connectées. Et si de telle lunettes pouvaient permettre un suivi des enfants atteints de troubles rares du sommeil. Dans les couloirs de l’Odéon, un projet s’échafaude. Ces enfants qui s’endorment soudainement en pleine journée, ne pourrait-on pas les équiper de montures, qui détecteraient les signes d’endormissement ? Ne pourrait on éviter tous les accidents donc ils sont victimes ?

Catégorie

Société

INTERVENANTS

Anne-Lyse CHABERT 

THÉMES

Dépendance

ANNÉE

2017